mardi 9 février 2016

Un peu de sexe avec Fabrice Hadjadj

Voici une nouvelle conférence de Fabrice Hadjadj, tentons de parler de différence de sexes d'un point de vue aussi bien de croyant que de profane. Cette conférence a été tenu lors d'une conférence de carême passée. Cela tombe bien, cette année il commence demain. Qu'il vous soit bon.

 



Mâle et femmes à son image



Il y a deux tentations. La tentation de la chair et la tentation du mépris de la chair. Chair sans esprit, esprit sans chair.


Introduction, Le charnel nous parait loin de l'esprit. 
Il ne faudrait pas en parler en temps de Carême ? Non, parlons-en ! Hadjadj voit deux raisons.

1 Nous acquiesçons au bavardage actuel. Le monde moderne se croit libérateur de la sexualité alors qu'il est anti-sexuel. Il appelle sexe ce qui est sa dégradation consumériste, non plus acte engageant toute la personne. Il peut séparer les sexes, le corps et l'âme, et être séparé de toute question d'engendrement.
Acte de jouissance consommateur avec sentiments publicitaires. Éclatement contre recueillement, divertissement mais non rencontre. Signe d'angoisse et de désorientation. Perte d'espérance. Pourquoi s'ouvrir à la vie ?...

2 Mauvaise conception du carême.
Carême est aussi pour développer la maîtrise de soi, mais cela peut seulement agrémenter son estime de soi ou pour son orgueil.
Il existe aussi une mortification moderne, régime, exercice, soirées, discipline de winner.
Mais au final pourquoi cette mortification ?
Dans la foi, c'est pour recevoir la vie en abondance. L'essentiel est dans le retour à la mort et à la résurrection. Pénitence dans la peine mais dans le repentir.
Si carême est retour à l'origine, il est convenable de parler de sexualité.



Être à l'image de Dieu se rapporte à l'union de l'homme et de la femme 

Il lit le texte de la genèse: humour et code génétique.

 Le second récit de la Genèse joue avec les singuliers et les pluriels du nom de Dieu et des hommes, signe de la Trinité.  L'homme trouve son unité seulement dans la communion. Ambivalence, parallèle grammatical, humain et image de Dieu, unité dans la pluralité, d'autant plus singulier qu'il rentre dans une communion.

Hadjadj signale le paradoxe suivant : Ce qui nous est invitation à dominer les bêtes est pourtant ce qui nous rattache à eux, c'est à dire être "mâle" et "femelle". Les chrétiens ne prêchent pas un dualisme mais incarnation et Paul ne cesse de nous inviter à nous méfier de la débauche et du puritanisme (corps, temple de l'Esprit), ne jamais séparer la chair et l'esprit. 

L'homme est à l'image de Dieu par sa sexuation. Pour défendre cette thèse, Hadjadj va partir des points ci dessus pour ensuite noter quelques préambules pour ensuite attaquer le vif du sujet.

1 La sexualité humaine est sexualité consciente de la mort.
Pas de réflexe. Il y a une sexualité humaine. Je ne suis pas une esprit qui pilote un corps humain. Ce n'est pas une sexualité animale à diriger vers la raison. Il y a une sexualité humaine contre la sexualité animales.
Engagement sexuel est engagement de personne et non déterminisme bestial dont devrait s'excuser notre âme.

2 Sexualité religieuse en elle même
Le rite remplace le rut
Dans toute société traditionnelle, la sexualité n'a rien de brutale, elle est ritualisé, on s'unit aux esprit, grand prêtre, grands rituels. Cela est vrai aussi pour notre époque.
Mais le seul rituel restant est la consommation. La sexualité est devenu acte consumériste.
Nous ne voulons pas la survie. 
La chair a besoin d'arche, besoin de l'espérance, pour s'épanouir. Pour quoi sinon? Aujourd'hui, nous ne voulons que la survie, que chaque être soit pour la félicité.
Pourtant ne plus voir l'arche d'alliance est aller vers la logique castratrice. C'est la  logique de la libération sexuelle qui est castratrice. Réduire la vie sexuelle à un acte de divertissement est le signe d'une fuite devant le désespoir.
Les parents, homme et femme, sont les témoins de l'espérance, de l'anticipation de la vie céleste.
Jésus est la pour accomplir cette arche. Pas en exemple mais en manière de finalité. Époux de toutes les âmes, dans l'arche de son corps, il permet la sexualité de s'accomplir. Malgré le déluge, on peut aller au delà du superficiel, joie et donner à la vie qui va vers la gloire de la résurrection.

3 Une relation non utilitaire
Comment penser la domination de l'homme sur la nature
Pas avec puissance. Faire sentir sa puissance est signe de la faiblesse.

L'homme bâtit une arche pour la nature et cela se retrouve dans la relation homme femme. il domine car il s’élève à l'ordre de la grâce, contemplation et compassion.
Sanctification du shabbat? Si homme et femme ressemblent à Dieu c'est que leur relation n'est pas seulement utile. C'est du travail mais aussi du sabbat. Amour de l'autre pour lui-même. L'un contemple l'autre et rend grâce au créateur. (Tous les arts s'enracinent de l'émerveillement devant la femme.) Adam à l'image de Dieu par son intériorité de relation pour la donation et l'hospitalité (arche)




et donc  enfin

Mâle et femelle sont les différences exemplaires car elles sont d'abord des noms de relations.
Le masculin est féminin parce qu'il est tourné vers le féminin et inversement.
Toute tentative de refus pour lui de s'identifier par rapport à la relation à la femme conduit à l’efféminement ou au machisme. Inversement, le féminisme devient machisme intériorisé avec des êtres en concurrence au lieu de les voir en relation.
Virilité : pas la bière mais bâtir une arche pour une femme.
Féminité, pas les cosmétiques mais ménager demeure pour un homme.
Ces noms de relation convergent vers la parentalité (charnelle ou spirituelle)
Jeux entre les deux premiers récits de la Genèse. Contradiction qui n'en sont pas. La lettre ne tue pas.
L'homme cherche à s'accomplir dans les relations. Il voit les animaux, il les nomme avant tout (vocation poétique). Mais il cherche une aide.

L'altérité ?
Dieu fut potier pour l'homme, bâtisseur pour la femme. Il ne nomme pas la femme, il chante une louange. C'est ma propre chair... Le femme le conduit hors de lui-même. Rien ne vaut le corps féminin en terme de construction. Elle est un coup d’arrêt à sa volonté de puissance. C'est la différence radicale, création de la femme, n'est pas clonage, mais avènement de ce qui est plus proche et le plus loin.
Invitation à aventure inédite. (amour de Dieu, du prochain et de soi deviennent indissociable)

Rien d’idyllique, aventure qui est un drame. Itinéraire vers Dieu. (Quitter, s'attacher, devenir un)
Croix, arche divin.

Conclusion
La sexualité humaine ne veut pas que le plaisir sensuel isolé égoïste mais veut la joie de la communion et de la fécondité dans l'espérance. Pour ces deux êtres blessés par la mort et le péché, elle exige que nous communions par nos plaisirs mais aussi dans nos angoisses, nos faiblesses, notre nullité. Or une telle communion n'advient en plénitude qu'a travers la croix de l'amour avec orgueil mis à mort, accueil de l'autre en tant qu'autre, qui est de lui pardonner et de se laisser pardonner pour entrer dans une vie qui surpasse tous nos projets


La morale sexuelle chrétienne est mystique. Elle barre des impasses pour ouvrir un chemin inimaginable à travers les eaux.

C'est la prétendue libération sexuelle qui est répressive avec ses mots restrictifs et frileux. Sexe comme un programme ou chacun jouit à part.
La sexualité n'exige pas de préserver mais de se donner
Ne nous enfermons pas dans un planning mais ouvrons à l’événement de la vie
L’Église n'impose rien, elle ne fait que révéler l'ordre de la réalité et donc la nature profonde la sexualité humaine.

lundi 1 février 2016

Arthur Rosman - Girard sur l'euthanasie

J'ai trouvé sur ce blog cette citation de René Girard. En voici une traduction de l'anglais.

L'expérience de la mort sera de plus en plus douloureuse, contrairement à ce que beaucoup de personnes croient. L'euthanasie qui vient la rendra toujours plus douloureuse parce qu'elle mettra l'accent sur la décision personnelle d'une manière qui était bienheureusement étrangère à tous les problème de "l'acte de mourir" dans les anciens temps. Cela rendra la mort de plus en plus subjectivement intolérable pour des gens qui se sentiront responsable de leur propre mort et moralement obligé de débarrasser leur proches de leur présences indésirées. L'euthanasie continuera à intensifier tous les problèmes que ses plaideurs pensent résoudre.

Avec ambition, le blogueur américain, Artur Rosman propose un lien entre les avocats de l'euthanasie et les protestants.
Les deux proposent des solutions énergiques pleines de bonne volonté qui ont pour fin des conséquences inattendues. Or, les solutions créent plus de problèmes que les problèmes qu'ils souhaitaient résoudre.

Tout se base sur un système "technocratique", comme dirait Hadjadj : critique, résolution de problème. Cet état d'esprit ne peut être renier mais il nous communique l'idée d'une vie qui n'est plus don mais auto-critique
Pour sortir du cercle vicieux, Rosman nous invite à laisser la vie couler, y être ouvert de telle manière que nous rendons grâce à la source. 
Cela sonne niais à la première écoute... Non ?
Cette ouverture n'est-elle pas impossible ? Comment ne pas nous imaginer comme Luther face au désordre de l’Église de son temps ? Comment penser qu'on ne craquera pas face à la douleur d'un cancer incurable ?
Avec Milosz, Rosman, nous invite à voir combien nous dépendons de la grâce inattendue.

Celle-ci n'est elle pas sous forme de croix, signe du paradoxe d'un Dieu mort ? La solution est en elle-même ce qui n'a pas de solution, qui est pure paradoxe. 
C'est ce que je comprends et ce que je partage avec cette note. A l'intérieur même de la vie chrétienne, il y a cette intuition folle et dénigrée que nos problèmes ne sont pas appelés à être résolu, "achieved", "géré" avec esprit critique mais à être transfiguré.
Comme si le chemin retour du péché originel s'appelait simplicité mais qu'il ne nous serait donné de le connaitre qu'à travers notre complexité et donc nos blessures.